Faire du lieu de travail un espace résilient

Au début de l’année 2022 nous avons été invités à concourir pour la restructuration d’un important complexe tertiaire à Boulogne. Une occasion pour LBBA de formaliser sa vision de l’architecture des lieux de travail « post covid », mais aussi avec l’aide du LabClimat, de proposer un projet dont le dérèglement climatique serait le point de départ de la conception.

Nous avons imaginé les besoins et usages d’un bâtiment dédié à l’univers du travail à l’horizon 2027, date théorique de livraison du bâtiment. Mais nous avons creusé plus loin : à partir des rapports du GIEC nous nous sommes projetés dans le contexte climatique de 2050.

Travail. A l’heure du quiet quitting et de la grande démission, comment et pourquoi donner du sens à un bâtiment dédié au travail ? Mais tout simplement parce qu’on y sera mieux que chez soi ! Et qu’en plus il y aura une vie sociale positive, la possibilité de venir pour ne pas travailler, ou plutôt pour travailler pour soi ou pour les autres.

Biodiversité. Le terrain est grand : nous allons garder 50% de surface non construite et 20% de surface de pleine terre. La Seine est notre voisine : nous allons aménager une noue paysagère, zone humide permettant de retenir les potentielles remontées d’eau du fleuve. Le patrimoine végétal est riche aux alentours : nous allons travailler avec un écologue pour compléter les palettes végétales avec des espèce hydrophiles et mettre en place des couloirs de biodiversité.

Le confort passif par la ventilation naturelle. Le contexte projeté de fortes chaleurs se double d’un contexte de sobriété énergétique: la ventilation du bâtiment est donc principalement naturelle (ou low tech). Compte tenu de la profondeur des étages, nous proposons des cheminées de ventilation assurant le confort d’hiver et le confort d’été avec un renouvellement constant de l’air dans les espaces intérieurs.

Refuge. Il s’agit de faire face à des vagues de chaleur plus récurrentes et plus intenses. Quand il fera trop chaud, les rez-de-chaussée semi enterrés ouvrant sur la partie des jardins exposés au nord seront des refuges accueillants et naturellement rafraichis grâce à l’inertie thermique et aux circulations d’air passant par les jardins humides.

Lutter contre l’îlot de chaleur. Le terrain est ouvert au vent d’ouest et nous avons la chance que le bâtiment existant ne bloque pas les colonnes d’air. La Seine, les vents dominants et la zone humide que nous avons aménagée seront nos meilleurs alliés pour composer un jardin d’ombre et de fraicheur afin de lutter efficacement contre l’îlot de chaleur urbain.

Agriculture urbaine. La configuration des lieux rend possible l’installation en toiture d’une vaste serre urbaine associée à des jardins partagés qui seront sous la responsabilité des utilisateurs du bâtiments ; ils seront regroupés sous forme d’associations ou de collectifs et la production sera redistribuée localement. A l’heure où l’agriculture doit se rapprocher de ses consommateurs, on ne compte pas les bienfaits d’une ferme urbaine pour son écosystème proche et les usagers de l’immeuble : refuge de biodiversité, production d’une nourriture saine et décarbonée, traitement et réutilisation des eaux grises, esthétique et convivialité du lieu… La cinquième façade devient un lieu de partage et d’échange qui fait profiter à ses usagers de superbes vues sur la Seine.

Être bien ensemble : l’architecte n’a pas le rôle d’organiser les groupes humains, mais il a le pouvoir de concevoir des lieux qui rendent les choses possibles. Être bien ensemble est la raison d’être de toute entreprise d’avenir, donner du sens à ce qui est fait est le souhait de tout être humain.